La prise en compte de l’électricité est un élément important dans le calcul des émissions d’une entreprise, notamment pour celles qui ont une activité qui génère une forte consommation électrique.
Le calcul des émissions liées à la consommation d’électricité est, en outre, rendu quelque peu complexe par le fait qu’il existe deux approches différentes en comptabilité carbone : l’approche dite location-based et l’approche market-based.
Quelles sont les différences entre ces deux approches et laquelle choisir selon la méthodologie utilisée (Bilan Carbone®, GHG Protocol ou BEGES réglementaires par exemple…) ? Qu’est-ce que cela change dans le calcul des émissions amonts de l’énergie dans le scope 3 ? Comment sont comptabilisés les Power Purchase Agreement ? Comment Sami travaille pour gagner en précision sur la mesure des émissions liées à l’électricité ?
On vous détaille tout dans cet article !
1. L’électricité, des émissions dans les scopes 2 et 3
En terme de comptabilité carbone, les émissions liées à la consommation d’électricité d’une entreprise se retrouvent dans deux scopes différents :
- Le scope 2
Le scope 2 regroupe les émissions indirectes liées à l’énergie et notamment celles liées à l’électricité.
Ce qui est comptabilisé ici, ce sont les émissions dites indirectes c’est-à-dire les émissions induites par la production de l’électricité utilisée ensuite au sein de l’entreprise.
Deux approches différentes existent afin de comptabiliser ces émissions : l’approche location-based et l’approche market-based. Nous y revenons en détail dans quelques instants.
- Le scope 3
Les autres émissions liées à la consommation d’électricité se retrouvent dans le scope 3, plus précisément dans le poste Amonts de l’énergie dans le Bilan Carbone® ou dans le poste Fuel and energy related emissions dans la méthodologie GHG Protocol.
Il s’agit ici de toutes les autres émissions indirectes liées à l’électricité : la construction des modes de production (centrale nucléaire, panneaux solaires ou éoliennes par exemple), la distribution de l’électricité, les pertes sur le réseau ou encore l’extraction et le transport d’énergies fossiles nécessaires à la production d’électricité.
2. Location-based ou market-based ?
Sur la comptabilisation des émissions liées à la consommation d’électricité du scope 2, deux approches différentes existent donc : Location-based et Market-based.
2.1 Quelles différences ?
- L’approche dite Location-based
Dans ce cas-là, les émissions sont calculées nécessairement à partir de l’intensité carbone moyenne du mix électrique du réseau où l’électricité a été consommée. Ainsi, pour une entreprise française, on prendra en compte le mix électrique moyen français, pour une entreprise allemande, le mix électrique moyen allemand, etc.
Dans cette approche, le mode de production du fournisseur ou du contrat (offre d’électricité verte avec garantie d’origine par exemple) n’entre pas en compte. L’entreprise ne peut donc pas le valoriser dans les émissions du scope 2.
- L’approche dite Market-based
Dans cette approche, les émissions prises en compte sont liées à l’intensité carbone des modes de production du fournisseur ou du contrat d’électricité choisis par l’entreprise. A défaut, si l’origine de l’électricité ne peut pas être tracée, c’est le mix résiduel qui est retenu.
Par exemple, dans le cas d’un contrat avec une électricité issue de l’énergie éolienne, le facteur d’émission associé sera de 0 gCO2e/kWh. Attention, cela ne signifie pas que les émissions totales indirectes liées à la consommation d’électricité sont nulles. Dans cet exemple précis, elles le sont pour les émissions comptabilisées dans le scope 2 mais elles ne seront pas nulles pour les émissions indirectes du scope 3, nous allons le voir un peu plus bas.
Dans l’approche market-based, les différents instruments et types de contrat valides (certificats, garanties d’origine, PPAs, etc.) doivent respecter un certain nombre de critères (ce que le GHG Protocol définit comme Scope 2 Quality Criteria), synthétisés dans le tableau suivant.
Parmi les critères à respecter, il y a donc des critères d’unicité de l’instrument valorisable par le consommateur (une garantie d’origine ou un PPA ne peut être valorisé que pour un seul consommateur), de spatialité (alignement entre le marché d’où est issu l’instrument et le marché où la consommation est réalisée), et de temporalité (même si pour le moment, le GHG Protocol stipule seulement de maximiser la granularité autant que possible, sans imposer de pas de temps minimum, mensuel ou horaire).
2.2 Quelle approche choisir ?
Le choix entre ces deux approches pour la comptabilisation de la consommation d’électricité est à faire en fonction du cadre méthodologique ou réglementaire dans lequel s’inscrit la réalisation du bilan des émissions de GES de l’entreprise. Voici un récapitulatif de l’approche à retenir selon le cadre :
Il s’agit bien d’obligation et pas seulement de recommandation : le Bilan Carbone® et le BEGES réglementaire imposent ainsi l’approche Location-based. La CSRD ayant choisi la méthodologie du GHG Protocol pour le reporting des émissions de GES, les entreprises devront évaluer leur scope 2 avec les deux approches, location et market-based.
2.3 Résumé et exemple
Voici un exemple de comptabilisation de la consommation d’électricité selon les deux approches :
Ainsi, le choix de l’approche de comptabilisation a un impact également sur la prise en compte des émissions du scope 3.
Dans le cas d’une approche Market-based, si l’origine de l’électricité consommée est renouvelable (énergie éolienne par exemple), les émissions associées pour le scope 2 sont nulles car la production de l’énergie éolienne n’entraîne effectivement pas d’émissions. En revanche, les émissions liées à l’amont de l’énergie ne sont pas nulles car il a fallu construire ces éoliennes, raccorder le parc au réseau, transporter cette énergie, inclure les pertes, etc. Dans ce cas là, le facteur d’émission associé est de 13gCO2e/kWh.
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3. Le cas particulier des PPAs (Power Purchase Agreement)
Les Power Purchase Agreement, ce sont ces contrats privés, passés généralement entre un producteur d’énergies renouvelables et un consommateur, qui permettent de fixer un prix sur une durée déterminée. Le marché des PPA est en plein essor en France, surtout depuis le début de la crise énergétique et de l’envolée des prix car c’est un moyen pour les consommateurs (entreprises ou collectivités) de s’engager sur un approvisionnement en énergie renouvelable sans subir la volatilité des prix et donc d’avoir de la visibilité sur ce sujet. Du côté des producteurs, cela leur offre une source de financement supplémentaire.
Comment ces PPA sont-ils pris en compte dans le bilan carbone ?
3.1 Le cas d’un PPA Physique
Un PPA physique se définit par le fait que l’électricité du parc de production (généralement d’électricité renouvelable) est achetée (via un tiers, fournisseur ou responsable d’équilibre) par le consommateur pour satisfaire sa consommation.
On distingue les PPA physiques on-site (connexion directe entre le mode de production et le consommateur, il s’agit d’autoconsommation) et off-site (pas de connexion directe entre production et consommation).
Les PPA on-site sont valorisables à la fois dans l’approche market et location-based.
Les PPA off-site ne sont valorisables dans le scope 2 des consommateurs d’électricité que dans le cas d’une approche de comptabilité market-based.
A noter la primauté d’une Garantie d’origine (GO) sur le PPA : le PPA est valorisable dans le scope 2 d’un consommateur uniquement dans les deux cas ci-dessous :
- s’il est associé à la garantie d’origine attribuée au mode de production renouvelable (GO bundled with electricity),
- ou seul uniquement s’il n’y a pas de garantie d’origine ou certificat généré et attribué à un autre consommateur (Contracts that convey attributes to the entity consuming the power where certificates do not exist, ou Contracts for power that are silent on attributes, but where attributes are not otherwise tracked or claimed).
En revanche, dans le cas d’une approche location-based, les PPA off-site ne peuvent a priori pas être valorisés dans le scope 2 des consommateurs d’électricité.
3.2 Le cas d’un PPA financier
Un PPA financier se définit par le fait que l’électricité du parc de production (généralement d’électricité renouvelable) est achetée puis revendue par le consommateur (via un tiers, fournisseur ou responsable d’équilibre), et ne satisfait donc pas la propre consommation de l’entreprise ayant contractualisé un PPA financier.
Dans ce cas, le PPA financier ne peut pas être valorisé dans le scope 2 de l’entreprise, que ce se soit via l’approche market ou location-based, mais peut en revanche être valorisé au titre des émissions évitées (si l’additionnalité peut être démontrée, ce qui est a priori bien le cas pour les PPA dits greenfield -associés à la construction de nouveaux parcs ENR, mais ne l’est pas forcément pour les PPA dits brownfield -associés à des parcs existants, par exemple en sortie d’obligation d’achat).
Pour rappel, les émissions évitées, c’est l’indicateur qui permet de calculer la contribution de l’entreprise (via ses activités, ses produits ou ses services) à la réduction des émissions de GES en dehors de son périmètre d’activité. On évalue ces émissions évitées en comparant le scénario avec la solution bas-carbone déployée et un scénario de référence sans solution bas-carbone.
Les émissions évitées ne sont pas intégrées au bilan carbone, on ne peut pas les soustraire au total des émissions de GES de l’organisation étudiée. En revanche, on peut les calculer séparément pour permettre à l’entreprise d’avoir des chiffres sur son impact en termes de décarbonation en dehors de son périmètre.
Les émissions évitées correspondent au pilier B de la Net Zero Initiative (NZI) lancée par le cabinet Carbone 4.
Voici un récapitulatif de comment sont intégrés les différents PPAs selon les approches :
La Net Zero Initiative (NZI) synthétise l’approche de comptabilité des émissions induites et évitées en fonction de l’achat de GO, PPA ou dans le cas de l’autoconsommation, pour les consommateurs.
4. Comment Sami travaille pour affiner le calcul des émissions liées à la consommation d’électricité
On l’a vu plus haut, dans le cadre de l’approche dite Location-based (et même avec l’approche Market-based quand l’origine de l’électricité ne peut pas être tracée), les émissions liées à la consommation d’électricité sont estimées grâce au mix électrique moyen du pays de consommation. Pour la France, on dispose pour cela de facteurs d’émissions annuels.
Mais il faut savoir que ce facteur d’émission est un FE moyen qui utilise les données de production et de consommation des 4 dernières années en France.
Pour les entreprises dont la consommation électrique pèse peu dans les émissions totales, cette estimation fournie à partir du FE du mix électrique moyen français ne pose pas de problème. En revanche, pour un client industriel avec une forte consommation électrique, connaître avec une bien plus grande précision les émissions qui y sont associées devient un enjeu important.
Pour y arriver, nous réalisons un calcul qui se base sur deux sources de données :
- la consommation électrique du client, au pas horaire sur toute l’année, collectée (après l’accord de l’entreprise) auprès d’Enedis.
- le facteur d’émission du mix électrique français au pas horaire sur toute l’année. Des données récupérées grâce à notre partenaire Electricity Maps.
Cela nous permet de faire correspondre, à chaque heure, la consommation électrique de l’entreprise avec le mix électrique observé.
En effet, les émissions associées au mix électrique varient significativement selon le mode de production de l’énergie, les imports/exports avec les pays frontaliers et donc varient selon l’heure de la journée, la météo ou encore la période de l’année.
Ces nouvelles données nous permettent :
- de beaucoup gagner en précision dans la mesure des émissions associées à la consommation électrique de l’entreprise
- d’établir un plan d’action lui aussi beaucoup plus précis : effacement de la consommation à certaines heures, décalage de consommation ou autoconsommation d’énergies renouvelables aux heures les plus carbonées, répartition de la consommation selon les saisons…
- de réaliser des calculs d’émissions évitées. Dans le cadre par exemple de la production d’électricité avec des panneaux solaires, on peut faire coïncider, à chaque heure de la journée, l’intensité carbone (en kgCO2e/kWh) de l’électricité produite sur le réseau avec celui de l’énergie solaire. Et obtenir ensuite les émissions évitées en CO2e. Cela peut être fait donc dans un cadre d’autoconsommation mais aussi dans le cas d’un contrat avec un fournisseur ou d’un PPA afin là encore d’estimer les émissions évitées permises par cet approvisionnement en énergie renouvelable.
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