CSRD : comment se préparer à l'audit du rapport de durabilité ?

Baptiste Gaborit

Rédacteur Climat

Recevez notre newsletter !

L’objectif de la CSRD est d’améliorer la qualité des informations ESG (environnementales, sociales et de gouvernance) publiées par les entreprises et d’harmoniser les règles de reporting de ces informations extra-financières. 

Pour cela, l’Union européenne a publié des normes de reporting harmonisées, les ESRS, et impose un audit de tous les rapports de durabilité. 

Comment va se dérouler l’audit de votre rapport ? Quels sont les points qui seront vérifiés par vos auditeurs ? Comment construire votre rapport tout en anticipant et en facilitant l’audit ? En bref, comment vous préparer à l’audit ? 

Nous revenons ici sur les grandes étapes de l’audit du rapport de durabilité afin que vous puissiez comprendre ce qui est attendu par les auditeurs et ainsi anticiper et garantir la conformité de votre rapport. Vous pourrez également télécharger dans cet article notre guide consacré à l'audit de durabilité dans lequel vous trouverez notamment le décryptage d’Audrey Leroy, commissaire aux comptes, associée du cabinet BDO France et responsable de l’offre ESG du cabinet. 

{{newsletter-blog-2}}

1. Quel auditeur et comment le nommer ? 

Le rapport de durabilité peut être audité par un commissaire aux comptes disposant d’un “visa durabilité” ou par un organisme tiers indépendant (OTI) accrédité par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC). 

La liste des professionnels pouvant auditer un rapport de durabilité est disponible sur le site de la Haute Autorité de l’Audit (H2A), en suivant ce lien

Vous pouvez nommer le commissaire aux comptes qui est déjà titulaire du mandat de certification de vos comptes (sous réserve qu’il dispose du visa durabilité) ou bien choisir un autre commissaire aux comptes ou un OTI. Vous pouvez également nommer un ou plusieurs auditeurs. 

La nomination de l’auditeur est une décision qui relève de l’assemblée générale ordinaire de l’entreprise. L’auditeur établit ensuite une lettre de mission afin d’expliciter les termes et les conditions de son intervention.

2. Les grandes étapes de l’audit du rapport de durabilité

L’audit du rapport de durabilité s’articule autour de 4 volets de vérification : 

  • la conformité de l’analyse de double matérialité et le respect de l’obligation de consultation du CSE
  • la conformité des informations avec les ESRS 
  • le respect des exigences du référentiel Taxonomie
  • la conformité avec l’exigence de balisage

Ce sont ces 4 grands axes que nous détaillons ci-dessous. 

2.1 Le contrôle de la conformité de l’analyse de double matérialité

Rappelons d’abord que l’analyse de double matérialité est le processus qui va permettre à l’entreprise de déterminer ses enjeux de durabilité matériels et donc les informations qu’elle va devoir publier dans son rapport de durabilité. C’est une étape fondamentale dans la construction du rapport et le processus pour mener à bien cette analyse de double matérialité est défini dans les ESRS. C’est ce respect de la conformité aux ESRS du processus de double matérialité qui va être audité. 

Dans le détail, cela signifie que les auditeurs vont vérifier : 

  • l’identification des parties prenantes: l’auditeur vient s’assurer que l’entreprise a mis en œuvre une démarche d’identification de ses parties prenantes et des impacts, risques et opportunités associés. 
  • la compréhension du contexte de l’entreprise : chaînes de valeurs, documentation interne…
  • l’identification et la description des impacts, risques et opportunités
  • l’évaluation (ou la cotation) des impacts, risques et opportunités : l’auditeur vient vérifier le processus mis en place, par exemple quels sont les critères retenus par l’entreprise pour évaluer l’ampleur, l’étendue et la probabilité d'occurrence des impacts positifs ? Ou encore quels sont les critères retenus pour évaluer la probabilité d'occurrence des risques et des opportunités et l’ampleur potentielle de leurs effets financiers ? Est-ce que l’entreprise a pris en compte également les bons horizons temporels ? 

Attention, ce sont bien les impacts, risques et opportunités (IRO) qui doivent être cotés et non les enjeux. Suite à la cotation, plusieurs IRO peuvent être rassemblés sous un même enjeu pour plus de lisibilité mais il ne faut pas faire l’erreur d’évaluer directement les enjeux de durabilité (voir l’interview d’Audrey Leroy), c’est un point qui est vérifié par les auditeurs. 

Enfin, les auditeurs s’assurent que le comité social et économique (CSE) de l’entreprise a bien été consulté sur les informations de durabilité. 

{{newsletter-blog-3}}

2.2 Le contrôle de la conformité des informations avec les normes ESRS

Les auditeurs viennent vérifier ensuite que les informations publiées dans le rapport de durabilité respectent bien les critères des ESRS. 

Concrètement, cela signifie que les auditeurs contrôlent d’abord que l’entreprise a correctement indiqué dans son rapport la démarche qu’elle a mise en œuvre pour établir les informations présentes : périmètre retenu, informations sur la chaîne de valeur…

C’est ensuite la présentation des informations publiée qui est auditée. Est-ce qu’elle respecte bien ce que demandent les textes européens ? Dans le détail, les auditeurs vont venir vérifier notamment que : 

  • les informations de durabilité ont été publiées dans une section spécifique du rapport de gestion
  • les informations sont bien structurées en 4 parties : informations générales, informations environnementales, informations sociales et informations en matière de gouvernance
  • ou encore lorsque des informations issues d’autres cadres de reporting sont publiées dans ce rapport, que les conditions de cette incorporation sont respectées. 

Dans un deuxième temps, les auditeurs vont se pencher de façon beaucoup plus précise sur la qualité et la pertinence des données publiées. Toutefois, compte tenu du volume d’informations attendu dans le rapport, les auditeurs ne vérifieront pas les données une à une. Ils vont donc identifier en amont des informations à vérifier spécifiquement. Pour sélectionner celles qu’ils vont contrôler, plusieurs critères seront pris en compte. Voilà quelques exemples : 

  • la complexité de l’organisation de l’entreprise : les contrôles ne seront pas les mêmes si l’entreprise n’a qu’une seule activité sur un seul site ou si elle opère dans plusieurs secteurs, sur plusieurs sites dans plusieurs pays. 
  • le nombre d’entités
  • les engagements portés par l’entreprise, notamment ceux qui sont publics
  • les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance sur lesquels est indexée la partie de la rémunération variable des dirigeants
  • ou encore l’existence de procès, contentieux, litiges ou controverses en matière de durabilité

Une fois les informations à vérifier sélectionnées, comment travaillent les auditeurs ? Concrètement, ils pourront procéder à des observations physiques, des inspections (sur site ou non) de documents, recourir à des bases de données sectorielles ou s’entretenir avec les commissaires aux comptes de l’entreprise (y compris des filiales pour le rapport de la maison-mère). 

2.3 Le contrôle du respect des exigences de publication des informations prévues par le référentiel Taxonomie

Le 3ème volet de la vérification du rapport de durabilité concerne le processus appliqué par l’entreprise pour identifier ses activités économiques durables, au regard du référentiel Taxonomie. Ces informations doivent figurer dans le rapport de durabilité. 

Pour rappel, pour identifier ses activités économiques dites durables, l’entreprise doit suivre un processus bien défini. Cela nécessite de : 

  • déterminer ses activités éligibles, c’est-à-dire celles qui entrent dans les 16 secteurs d’activités définis comme éligibles à la Taxonomie par la Commission européenne. 
  • déterminer le caractère aligné des activités éligibles. Pour cela, l’entreprise doit vérifier que ces activités répondent à plusieurs conditions, notamment qu’elles contribuent à un ou plusieurs des six objectifs environnementaux fixés par la Commission et qu’elles ne causent pas de préjudice important à aucun de ces objectifs. 
  • déterminer les indicateurs clés de performance pour les activités éligibles et alignées. 

Les auditeurs vont donc contrôler le processus mis en place par l’entreprise pour déterminer ses activités éligibles et alignées, si l’analyse couvre bien l’ensemble des activités économiques de l’entreprise (dans son périmètre consolidé), si les conditions pour déterminer l’alignement des activités éligibles sont bien respectées, quelles méthodologies ont été employées ou encore la concordance entre les informations chiffrées utilisées pour les indicateurs clés de performance et les données issues des états financiers. 

Là encore, les auditeurs sélectionneront des informations spécifiques à vérifier, sur la base de nombreux critères, dont certains ont été cités dans la partie 1.2. 

{{newsletter-blog-2}}

2.4 Le contrôle de la conformité du balisage au format d’information électronique unique

Des balises sous format XBRL devront être intégrées dans le rapport afin que ce dernier puisse être lu informatiquement et ainsi accélérer la comparaison entre les rapports. 

Néanmoins, la méthodologie du balisage n’a pas encore été communiquée par l’EFRAG. Difficile d’en dire plus à ce stade. 

3. Nos 3 conseils pour se préparer à l’audit de son rapport

  • Documenter sa démarche

La transparence, c’est le maître mot du rapport de durabilité. Rappelons-le, la CSRD est une obligation de dire, pas de faire. Les auditeurs vont venir vérifier que les processus que vous avez mis en place respectent bien les normes ESRS ou le référentiel Taxonomie, que les données que vous publiez sont fiables ou pourquoi vous avez décidé de ne pas publier telle ou telle information. Tout cela doit être expliqué, sourcé, documenté. 

Cette transparence vous permettra de grandement faciliter vos échanges avec les auditeurs et donc de franchir cette étape beaucoup plus facilement, sans risquer de devoir aller chercher de nouveaux documents explicatifs ou de devoir revenir sur une partie de votre rapport en cas de non conformité. 

C’est d’autant plus vrai si vous anticipez cette exigence de transparence. Vous avez tout intérêt à l’intégrer dès le début de votre démarche, notamment lors de votre analyse de double matérialité où vous devrez pouvoir justifier le processus que vous avez mis en place afin d’identifier et de coter les impacts, risques et opportunités. 

  • Monter une équipe en charge du projet et impliquer toutes les fonctions clés de l’entreprise

Les informations attendues dans le rapport de durabilité concernent de très nombreux services de l’entreprise : des ressources humaines jusqu’à la direction achat, en passant par la direction financière. L’équipe en charge du projet doit pouvoir intégrer le plus de fonctions clés possibles afin de mettre en place des processus fiables et qualitatifs. 

Par ailleurs, les données à remonter sont nombreuses, impliquant souvent des filiales, des sites différents, des activités différentes. Vos données devront être collectées mais aussi vérifiées, consolidées. Pour assurer la fiabilité et la traçabilité de ce processus et ainsi faciliter l’audit, il est nécessaire de déterminer avec précision l’organisation que vous souhaitez mettre en place. 

  • S’équiper d’un logiciel dédié au rapport de durabilité

Transparence, traçabilité, fiabilité et gouvernance. Face à ces impératifs, il apparaît aujourd’hui essentiel pour les entreprises de s’équiper d’un outil dédié au reporting de durabilité. C’est ce logiciel qui vous permettra de documenter votre démarche au fur et à mesure, d’assurer la traçabilité de vos données, d’assurer que vous n’oubliez rien dans ce qui est demandé dans les ESRS, d’organiser la collecte et d’écrire votre rapport. La présence d’une plateforme avec un espace dédié à l’auditeur permettra à ce dernier de naviguer dans votre rapport, vos différentes données et vos justifications, rendant ainsi la phase d’audit beaucoup plus efficace et sereine. 

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les entreprises devront intégrer des balises XBRL sur les informations de durabilité et que le rapport de gestion devra être fourni sous le format électronique unique européen (ESEF). C’est ce que permettront certains outils lorsque les normes de balisage auront été publiées. 

Mission Décarbonation

Chaque mois, un décryptage de l’actualité climat des entreprises et nos conseils pour vous décarboner, suivis par plus de 5000 responsables RSE.

Ne ratez plus les dernières actualités climat et anticipez
les nouveautés réglementaires !

Guide - Comment se préparer à l'audit du rapport de durabilité ?

Découvrez notre nouveau guide consacré à l'audit du rapport de durabilité avec notamment l'interview d'Audrey Leroy, associée de BDO France, commissaire aux comptes et spécialiste RSE

Comment réussir son analyse de double matérialité ?

Découvrez notre guide consacré à l'analyse de double matérialité avec toutes les étapes détaillées

Sur la même thématique

Nos autres articles pour aller plus loin, écrits avec autant de passion 👇

Illustration Blogpost
Réglementations
20/12/2024
6 mins

Comment publier son BEGES sur le site de l'Ademe ?

Quelles informations faut-il transmettre pour la publication du BEGES sur le site de l'Ademe ? Où les trouver ? Vous trouverez ici toutes les explications et des exemples.

Baptiste Gaborit

Rédacteur Climat

Illustration Blogpost
Réglementations
20/12/2024
7 mins

PME et TPE : construire une stratégie RSE solide grâce au cadre volontaire de la CSRD

Comment appliquer le cadre volontaire de la CSRD pour les TPE et PME et quels avantages à le faire ?

Chloé Boucher

Rédactrice climat

Illustration Blogpost
Réglementations
20/12/2024
7 mins

Standards de reporting extra-financier : comment s’y retrouver ?

Quels sont les grands standards de reporting extra-financier dans le monde ? Quelle interopérabilité entre eux ? Décryptage dans cet article.

Chloé Boucher

Rédactrice climat

Sur la même thématique

Nos autres articles pour aller plus loin, écrits avec autant de passion 👇

No results

Aucun élément correspondant à vos critères

Les commentaires

Merci, votre commentaire a bien été envoyé et sera publié dès validation par notre équipe 🤓
Votre commentaire n'a pas été envoyé, veuillez réessayer et nous contacter si le problème persiste 🤔
Pas encore de commentaire, soyez le premier à réagir ✍️