L’Union européenne adopte une mesure ambitieuse pour la finance verte : le règlement SFDR. Deux objectifs. 1/ Plus de transparence sur les impacts sociaux et environnementaux des investissements. 2/ Des informations homogènes, donc comparables. Bref : l’Europe tient bel et bien à guider les investissements vers une économie plus durable ! Qui est concerné par la Sustainable Finance Disclosure Regulation ? Quelles en sont les obligations ? On vulgarise tout ça pour vous : 6 minutes pour comprendre !
1. Le Règlement SFDR de l’UE, en quelques mots
1.1 Une réponse aux enjeux climatiques : la finance durable
Le meilleur moyen d’atteindre les objectifs bas-carbone, fixés en autres par les Accords de Paris ? Orienter la finance vers des initiatives plus vertueuses. Voilà le parti pris de l’Union européenne.
Le problème ? Les investisseurs manquent d’informations fiables et comparables pour choisir des produits financiers plus durables… Et en adéquation avec leurs objectifs de rentabilité. Aujourd’hui, chaque pays en Europe établit ses propres règles et normes de publication - plus ou moins exigeantes.
Face à ces enjeux, l’UE a établi un plan d’action sur la finance durable. Au programme : un ensemble de mesures interdépendantes, pour encourager et faciliter l’investissement responsable. Entre autres, la Commission européenne propose la règlementation SFDR - Sustainable Finance Disclosure Regulation, entrée en vigueur le 10 mars 2021. En français : règlement sur la publication d’informations de durabilité dans le secteur des services financiers… Ou encore (UE) 2019/2088.
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1.2 Les obligations du SFDR, en un coup d’œil
Les acteurs qui commercialisent ou conseillent sur les produits financiers ont déjà des obligations de transparence. En particulier, sur :
- les critères extra-financiers (ESG, impacts sociaux, environnementaux et de gouvernance) ;
- les processus de choix de produits financiers.
Avec le SFDR, l’enjeu est d’harmoniser et renforcer ces informations. Deux objectifs, donc :
- Imposer une plus grande transparence concernant les impacts environnementaux et sociaux des produits financiers.
- Normaliser la publication de ces informations dans l’UE, pour les rendre comparables.
1.3 Pour les investisseurs
Ce règlement de la finance durable permettra aux investisseurs de comparer plus facilement des produits d’investissements, au sein de l’Union européenne. Le retour sur investissement ne sera plus le seul critère de choix ! En repérant les solutions vertueuses, les investisseurs pourront réorienter leurs capitaux vers les initiatives de l’économie durable.
Par ailleurs, cela crédibilise les solutions de la finance durable. La transparence imposée aux gestionnaires d’actifs et conseillers rend plus difficile le greenwashing pour ces derniers. Toute allégation doit être justifiée.
2. Qui est concerné par le règlement (UE) 2019/2088, sur la durabilité du secteur financier ?
2.1 De nombreux acteurs concernés
La Sustainable Finance Disclosure Regulation concerne, volontairement, une grande partie des acteurs financiers. Ainsi, il s’applique…
- Aux acteurs et conseillers financiers établis dans l’UE.
- Aux conseillers et gestionnaires d’actifs établis en dehors de l’UE, et faisant commerce au sein de l’UE.
À noter : les acteurs des marchés financiers comptant moins de 500 salariés peuvent s’exempter d’une partie des obligations. Ces PME n’ont pas l’obligation de publier des informations sur les impacts négatifs de leurs investissements en termes de durabilité… À condition d’expliquer publiquement les raisons de ce choix !
2.2 Sociétés de gestion et conseillers en investissement : késako ?
Les obligations du règlement SFDR concernent les gestionnaires d’actifs et conseillers en investissement.
Faisons un court point de vocabulaire :
- Les gestionnaires d’actifs se voient confier des capitaux par les investisseurs. Ils choisissent ensuite vers où diriger cet argent, pour le faire fructifier. Ainsi, l’investisseur délègue cette gestion.
- Les conseillers, au contraire, se contentent d’apporter leur avis d’expert… Sans avoir le dernier mot, ni la possibilité de manipuler réellement les capitaux.
Ceci dit, ces deux types de structures du secteur financier sont soumis au SFDR, donc à la publication d’informations extra-financières sur leurs activités et produits d’investissement.
2.3 Les produits financiers dans le viseur
Les produits concernés sont les suivants.
- Les conseils financiers.
- Les fonds alternatifs. Il s’agit de la mise en commun de capitaux par plusieurs investisseurs. La somme totale est ensuite pilotée par une société de gestion.
- La gestion de portefeuille (qu’on appelle aussi gestion déléguée ou pilotée). L’investisseur confie son capital à un professionnel, et en délègue le pilotage.
- Les OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières). Ce sont des intermédiaires, permettant d’investir sur des marchés financiers difficiles d’accès autrement.
- Un produit d’investissement fondé sur l’assurance.
- Un produit ou un régime de retraite.
- Un PEPP, produit d’épargne retraite individuelle.
3. Quelles sont les obligations de la Sustainable Finance Disclosure Regulation ?
Le règlement porte sur deux obligations de transparence.
- Transparence sur les impacts négatifs des produits financiers, au regard des critères ESG.
- Transparence sur les processus de choix des investissements, en particulier sur la prise en compte des risques et incidences négatives en matière de durabilité.
On décortique tout ça ?
3.1 Publication d’informations sur les impacts extra-financiers des investissements
Les sociétés des marchés financiers concernées doivent…
- Expliquer leurs politiques concernant l’identification et l’évaluation des principales conséquences négatives de leurs investissements. Elles doivent également lister les indicateurs pris en compte. Par exemple, émissions de gaz à effet de serre, matières premières consommées, etc.
- Décrire les impacts ESG identifiés… Mais aussi les mesures prises - ou prévues - face à ce constat.
- Résumer leurs politiques d’engagement.
- Ces informations doivent suivre les normes de la directive européenne, afin d’assurer la comparabilité des différents produits d’investissement.
Pour les acteurs de moins de 500 salariés, cette mesure est facultative. Simplement, la non-publication des informations doit être justifiée.
💡 À lire aussi : Les critères ESG dans le monde de la finance.
3.2 Transparence sur les processus de choix d’investissements
Les organismes concernés doivent dévoiler la manière dont ils choisissent leurs investissements… Ou plus précisément, dans quelles mesures ces décisions prennent en compte les risques et impacts négatifs en matière de durabilité.
- Les risques en matière de durabilité.
Il s’agit d’anticiper les événements ou situations liés aux domaines ESG, qui pourraient avoir un impact négatif important sur la valeur de l’investissement. Par exemple, si l’entreprise de gestion investit dans des bâtiments, il s’agit de prendre en compte la montée des eaux ou les risques d’inondation, pouvant affecter le bien. - Les impacts négatifs sur les critères ESG (environnement, social, gouvernance).
Les organismes qui ne prennent pas en compte ces incidences doivent justifier ce choix… Mais aussi indiquer si et quand les impacts ESG seront pris en compte !
Les acteurs des marchés financiers doivent publier ces informations sur leur site internet.
3.3 Des obligations complémentaires pour les acteurs français
Certains pays de l’Union européenne ont déjà des textes similaires en vigueur. Dans ce cas, sauf évolution réglementaire à l’échelle nationale, les deux mesures s’appliquent.
C’est le cas en France ! Les acteurs de l’Hexagone doivent toujours respecter…
- L’article 173 de la loi Transition Énergétique, concernant le reporting extra-financier. C’est le suivi des informations non monétaires : sociales, environnementales ou de gouvernance. Ce texte impose déjà de la transparence concernant la prise en compte de ces critères dans les investissements.
- L’article 29 de la loi Énergie et Climat, qui impose également la publication d’information sur la prise en compte des risques climatiques et liés à la biodiversité.
3.4 Quand les obligations sont-elles applicables ?
Le règlement européen sur la publication d’informations de durabilité dans le secteur des services financiers est mis en application depuis le 10 mars 2021.
De plus en plus, l’Union européenne s’engage pour le climat dans la finance. La Sustainable Finance Disclosure Regulation est un bon exemple de sa ferme intention de rediriger les capitaux vers des initiatives durables. La réglementation SFDR suffira-t-elle à bâtir une économie plus durable ? L’avenir nous le dira. Pour ne pas manquer les dernières actus et réglementations relatives au climat : abonnez-vous à notre newsletter.
Sources
Sources consultées en décembre 2022.
- RÈGLEMENT (UE) 2019/2088 du parlement et du conseil, sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers, Journal officiel de l’Union européenne, décembre 2019.
- Comprendre le règlement SFDR, J.P. Morgan Asset Management, juillet 2022.
- Un pas important pour la finance durable en Europe : les obligations de transparence, ACPR Banque de France, avril 2021.
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