Foot et climat : le bilan carbone du ballon rond

Alexis Lepage

Expert carbone @Sami, passioné de climat et de football (pas toujours de tout repos)

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Si l’on veut s’intéresser au bilan carbone du sport, il faut évidemment d’abord regarder du côté du sport le plus populaire au monde : le football

Les chiffres sont impressionnants :

  • 1,2 milliard de personnes devant la finale de la Coupe du Monde 
  • 250 millions de personnes dans le monde et 2,2 millions de licenciés en France
  • 30 000 matchs tous les weekends en France pour 15 000 clubs amateurs et professionnels
  • Environ 500 km2 de surface de terrains de foot en France, soit 0,1% de la surface du pays

Le football est partout et occupe une place centrale dans la vie de très nombreux citoyens. Il fait vivre des émotions fortes, il rassemble, divise parfois mais laisse rarement indifférent. Il crée les grandes stars du monde moderne : la personne la plus suivie sur Instagram est Cristiano Ronaldo avec 353 millions de followers.

En tant que sport le plus populaire, le plus pratiqué et le plus adoré, l’impact du football en matière d’émissions de gaz à effet de serre et donc sa contribution au changement climatique est très importante. 

Pourtant à ce jour, il n’existe aucune étude ayant calculé le bilan carbone du football au niveau mondial. On peut citer l’estimation très conservatrice réalisée dans l’étude Playing Against the Clock de 10M de tonnes de CO2 pour le sport mondial (l’équivalent des émissions du Luxembourg ou de la Côte d’Ivoire), mais qui ne donne pas d’estimation pour le football. 

Alors pour comprendre l’impact carbone du foot, prenons l’angle du bilan carbone des clubs de football et des grandes compétitions internationales.

1. Bilan carbone d’un club de foot

1.1 Les infrastructures

Le poids du béton dans la construction des stades

D’abord, les infrastructures (stade, parking, aménagements urbains) pèsent lourd sur le bilan carbone d’un club de football. 

Par exemple, l’Olympique Lyonnais, club emblématique du championnat de France, a fait le pari de construire son propre stade, le “Parc OL”. Entre le stade, les aménagements pour les transports, les bureaux du siège du club, une boutique, 7 000 places de stationnement, un centre d’entraînement et des équipements de loisirs, le club a vu les choses en grand. Or pour construire un tel stade, il faut beaucoup de béton. Près de 120 000 m3 de béton ont été coulés en quelques mois, un volume conséquent. 

Le problème ? Le béton émet beaucoup de CO2 lors de sa production. D’après l’ADEME, la production d’une poutre en béton armé engendre l’émission de 398kg CO2e / m3. Faisons un rapide calcul :

120 000 m3 de béton x 398kg CO2e = environ 48 000 tonnes de CO2e. Soit l’équivalent de ce qu’émettent 4800 Français pendant un an (9,9 t / personne / an selon les derniers chiffres disponibles).

Alternatives au béton, usages mutualisés et rénovations : les solutions

Le choix des matériaux a une grande importance dans l’impact carbone de la construction d’un stade de football. Par exemple, l’OGC Nice a privilégié une structure en résille de bois venant de forêts gérées de façon durable plutôt que les traditionnelles poutres métalliques, estimant le gain CO2 à 3000 tonnes

Autre exemple en Angleterre : le club de 4e division des Forest Green Rovers, souvent considéré comme “club le plus écologique du monde”, va évoluer dès 2025 dans un stade de 5000 places quasi exclusivement construit en bois

Eco-park - le nouveau stade des Forest Green Rovers

Enfin, d’autres solutions peuvent être mises en avant pour limiter ou mieux amortir l’impact carbone de la construction des stades : 

  • mutualiser les usages pour s’assurer d’un taux d’utilisation du stade élevé (exemples : les deux clubs de Milan qui jouent dans le même stade de San Siro ; le Stade de France qui accueille de nombreux évènements hors football)
  • challenger l’intérêt de construire un nouveau stade et privilégier l’agrandissement ou la rénovation de stades existants
  • prolonger la durée de vie des stades

L’énergie, la restauration, la pelouse : les autres impacts des infrastructures 

L’électricité qui alimente le stade ne représente pas un poste d’émissions très important pour les clubs de foot français grâce au mix électrique français faiblement carboné, mais ce n’est malheureusement pas le cas dans tous les pays. Dans certains pays comme l’Allemagne, c’est un poste d’émissions important. D’autant plus lorsque sont utilisées des machines de chauffage de la pelouse, notamment en hiver.

Beaucoup de clubs dans le monde font dès lors des efforts pour s’approvisionner ou produire eux-même de l’électricité peu carbonée en installant des panneaux solaires sur la toiture des stades ou dans les environs. Par exemple, l'Olympique Lyonnais a annoncé en début d’année l’installation de 50 000 m2 de panneaux solaires dans son complexe d’activités, l’équivalent de la consommation annuelle de 2500 foyers.

La pelouse est également source d’émissions car elle est entretenue par des pesticides et désherbants et coupée avec des tondeuses thermiques. En plus de consommer énormément d’eau ! Certains clubs agissent sur ce terrain, comme bien sûr les Forest Green Rovers qui annoncent une pelouse sans pesticide et désherbant, entretenue par une tondeuse à énergie solaire et arrosée par de l’eau de pluie

Petit geste à grande conséquence ? Oui ! D’après Football France Écologie, c’est près de 100 millions de m3 d’eau qui sont utilisés chaque année en France pour arroser les pelouses de football, ce qui représente en moyenne le tiers de la consommation en eau des communes. 

Enfin, la restauration représente également un poids carbone important pour les clubs de football. Une étude allemande a permis d’établir le nombre de ... saucisses consommées en moyenne pendant un match de football. 

Lors de la Coupe du Monde 2018 en Russie, 64 matchs ont été joués avec une moyenne de 49 000 spectateurs par match et un total de 24 650 saucisses englouties pendant la partie. On estime que chaque match est à l’origine de l’émission de plus de 3 tonnes de CO2, soit au total 195 tonnes de CO2 pour toutes les saucisses consommées lors de l’événement. En y ajoutant la pollution liée aux plastiques à usage unique et aux autres produits consommés, le poids carbone de la restauration grimpe vite. 

Pour contrer cela, le club des Forest Green Rovers ne sert que des plats sans viande, un important contributeur au réchauffement climatique à ses supporters. 

1.2 Les déplacements des supporters et des équipes

Déplacements des supporters : 1er poste d’émissions des clubs de football

Les déplacements des supporters sont considérés comme l’impact le plus important dans le bilan carbone d’un club de football. Ce sont surtout les déplacements pour les matchs “à domicile” qui comptent, mais selon les clubs l’impact des déplacements à l’extérieur peut également être non négligeable.

Exemple ici avec le club de Wolfsburg en Allemagne, dont le déplacement des supporters (“Fan Mobility”) représente presque 60% du total du bilan carbone :

Répartition du bilan carbone de Vfl Wolfsburg (empreinte carbone 2019/2020 estimée 9,461 tonnes de CO2e)

Autre exemple avec le club brésilien de Fluminense FC, pour qui 47% du Scope 3 du bilan carbone concerne le déplacement des supporters (“Audience mobility”) :

Répartition du Scope 3 du bilan carbone 2014 de Fluminense FC (le Scope 3 représentant 94% du bilan)

Dans le cadre du Climate Neutral Now, qui encourage les organisations à agir pour mesurer, réduire et compenser leurs émissions de gaz à effet de serre, le LOSC (à Lille) a fait mesurer l’empreinte environnementale de ses activités quotidiennes, notamment les déplacements de ses différentes équipes (Pro, Pro 2, Féminines).  

Comme le rappelait récemment Pierre Galio dans une interview So Foot : “Si vous construisez un stade à vingt bornes de la ville, et que vous n’avez pas prévu de transport autre que la voiture, c’est une catastrophe” en termes d’émissions.  

Alors que faire pour limiter cet impact ? 

Transports en commun, covoiturage, bornes de recharge : les solutions

Les clubs tentent de plus en plus de connecter les stades à une riche offre de transports en commun et certains clubs comme l’Olympique Lyonnais incluent au prix du ticket un trajet gratuit en transports en commun. 

Mais cela ne fonctionne que partiellement, les parkings autour des stades et leur localisation parfois éloignée des centres-villes poussant en général les supporters à utiliser leur voiture pour venir supporter leur équipe. 

Dès lors, deux solutions se dessinent :

  • mettre en place des solutions de covoiturage
  • installer des bornes de recharge dans les parkings pour les véhicules électriques

Par exemple, lors du derby d’octobre 2021 opposant l’Olympique Lyonnais et L’AS Saint-Étienne, le dernier cité faisait la publicité de son service de covoiturage pour permettre aux fans des Verts de covoiturer pour se rendre au stade. 

Le club de Forest Green Rovers, encore une fois cité en exemple, a installé de nombreuses bornes de recharge pour inciter les supporters à venir en voiture électrique plutôt que thermique.

Enfin, à l’heure où la télévision et les services de streaming offrent un spectacle toujours plus immersif, à quel point la passion du stade est-elle une expérience obligatoire pour les supporters ? Une question délicate mais qui mérite d’être posée.

Les déplacements des équipes professionnelles


Au-delà des déplacements des spectateurs, l’impact des déplacements des équipes n’est pas négligeable pour les clubs professionnels. 


En effet, ils n’hésitent pas à recourir à l’avion pour leurs déplacements d’un match à l’autre, même lorsque les trajets sont courts et tout à fait réalisables en bus ou en train. On estime que 82% des équipes professionnelles en France utilisent des vols privés pour leurs déplacements

Là encore, le passage au train ou à minima au bus permettrait de réduire les émissions, même si cela pose parfois des défis en matière de sécurité ou de de temps de récupération des joueurs. 

Mais certains clubs montrent l’exemple dans le domaine, comme l’Ajax Amsterdam qui avait fait le déplacement à Lille en train pour disputer un match de Ligue des Champions en 2019 et qui multiplie les trajets en train.

Point intéressant à noter : des clubs ou des joueurs sont depuis peu pointés du doigt lorsqu’ils utilisent l’avion pour de très courtes distances. Un signe de l’évolution des mentalités ?

Les supporters sont-ils demandeurs de changements ?

Dans une consultation menée par Football France Écologie, association qui a pour but de pousser à la transition écologique du football en France, 62% des répondants pensent que le football n’est pas un sport écologique et 80% ne sont pas capables de citer des actions environnementales menées par les acteurs du football. Pourtant, toujours selon la même consultation, 8 répondants sur 10 auraient une image plus positive du football professionnel s’il se tournait vers la durabilité

1.3 Maillots, ballons et équipements 

Dans l’empreinte carbone d’un club de foot, on pense également aux équipements, maillots, ballons utilisés et à tous les produits dérivés vendus. 

Les maillots

Chaque année, les clubs commercialisent plusieurs jeux de maillots, poussant ainsi les supporters à la consommation. Pourtant, une fois les maillots de la saison suivante mis en vente, les maillots de l’année précédente ne représentent que très peu de valeur aux yeux des supporters. Pour contrer cela, le club de Saint-Étienne organise à chaque intersaison une braderie permettant de proposer des maillots et des produits à des prix très attractifs aux supporters. Les fonds sont ensuite reversés à des entités d'intérêt général. 

Côté conception, les clubs innovent aussi quant aux matériaux utilisés. Le FC Nantes propose depuis cette saison un maillot fabriqué en Eco-Softlock, un tissu en polyester recyclé et certifié par la norme internationale The Global Recycled Standard. Chaque maillot est fabriqué avec l'équivalent de 13 bouteilles en plastique de 0,5 litre, recyclées. Plus innovant encore, chaque maillot est consigné. Lorsqu’un supporter ramènera un maillot en boutique, il recevra 10€. Un excellent moyen d’assurer un recyclage optimal en fin de vie du produit. 

Les ballons

Côté ballons de foot, citons Jean-Baptiste de Tourris, cofondateur de Vista : “Aujourd’hui, les ballons de foot, ce n’est que du plastique non réparable, non recyclable et produit pour la majorité en Chine, en Inde ou au Pakistan. Plus aucun ballon n’est produit en Europe”. 

La jeune entreprise s’engage à proposer un ballon “à 50% issus de matières recyclées” (le cuir provient de sièges d’avion ou de voiture récupérés par une ONG basée en Afrique). Une révolution face aux ballons traditionnels, composés à 100% de matériaux plastiques neufs. 


Le poids carbone des équipements reste cependant négligeable en comparaison à la construction des infrastructures et aux déplacements des joueurs et des équipes.

1.4 Sponsors, pub et streaming

Les sponsors 

Au-delà des émissions de CO2 liées directement à un stade, un club ou un match, vient aussi la question des émissions indirectement engendrées par le football, notamment via les sponsors.

Les sponsors d’énergies fossiles ou liées aux énergies fossiles sont très présents dans le monde du football : Gazprom, Qatar Airways, Emirates, Volkswagen, Kia sont sponsors de clubs très connus ou même parfois des institutions internationales que sont la FIFA et l’UEFA. 

Impossible de connaître précisément l’impact de ces publicités sur la consommation d’énergies fossiles ou de services très carbonés mais il apparaît évident que cela n’est pas “neutre”.

Les téléspectateurs : télévision et streaming

Le visionnage des matchs de football a également un impact de plus en plus important, pour plusieurs raisons :

  • Hausse des audiences
  • Multiplication du nombre de matchs
  • Augmentation de la part de streaming par rapport à la télévision 

En Angleterre, une étude de Carbon Trust a révélé que le visionnage d’un match sur une télévision plasma de 42 pouces représente l’équivalent de 480 g de CO2e, le même match sur une télévision LED de 45 pouces pèse de son côté 310 g de CO2e, la TV LED étant moins énergivore. 

Regarder un match sur une tablette engendre entre 60 et 380 grammes d’émissions de CO2e, lorsqu’elle est connectée à un réseau wifi. Dans le cas où la tablette est connectée en 3G (l’étude date du début des années 2010), le bilan carbone explose et passe à 3,7kg de CO2e. Si ces chiffres paraissent individuellement dérisoires, il faut les rapporter au nombre de téléspectateurs. L’audience moyenne des matchs de Ligue 1 diffusés sur Canal + était de 851.000 téléspectateurs la saison passée.

À l’heure où les droits de retransmission de la Ligue 1 sont entre les mains d’un “pure player” du streaming Amazon Video, on se pose légitimement la question du poids carbone des téléspectateurs qui regardent les matchs en streaming. Un match en streaming, c’est de la consommation de données sur des terminaux parfois gourmands en énergie et qui sollicitent des serveurs et le réseau pour acheminer la data. 

Pour rappel, le Shift Project a calculé que “le numérique émet 4% des gaz à effet de serre du monde, alors que sa consommation énergétique s’accroît de 9% par an”. 

Difficile cependant de savoir dans quelle mesure la télévision et le streaming permettent d’éviter le transport et les coûts environnementaux générés par les spectateurs qui suivent physiquement leur équipe.

1.5 Où en sont les clubs de football en France ?

Dans le rapport Playing Against the Clock précité, on retrouve le tableau ci-dessous des engagements de quelques clubs de Ligue 1 :


De nombreux clubs du championnat de France prennent conscience de l’importance de leur rôle à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique. Antoine Miche, le fondateur de Football France Écologie précise que nombreux sont ceux qui s’orientent vers la transition écologique. Il cite plusieurs initiatives : 

  • démarche interne zéro déchets et futur centre de formation éco-responsable pour le PSG ;
  • formations des jeunes du centre de formation aux enjeux climatiques au TFC ;
  • création de zones de biodiversité et d’alimentation éducative et transports en commun gratuits à l’OL ;
  • audit énergétique des sites à l’OM et rénovation écologique d’ici 3 ans de la Meinau (RCS).

Dans le cadre de l’écriture de cet article, nous nous sommes rapprochés de deux des plus emblématiques clubs de notre championnat : l’OM et le LOSC. À Lille, la thématique climatique devient incontournable, le LOSC a d’ailleurs reçu le prix “Excellence environnementale” du CNOSF en 2020. Du côté de Marseille, le climat devient aussi un pilier de la stratégie du club, qui a récemment été certifié par la norme ISO 20121 (événementiel pour un développement durable). 

Trois grandes thématiques sont à retenir de nos échanges : 

  • Le football est un sport tellement populaire que les efforts fournis par les clubs doivent être menés main dans la main avec les départements et les régions. À Marseille ou à Lille, les discussions autour des transports et de la desserte des stades sont au cœur des préoccupations et les métropoles ont tout leur rôle à jouer dans cette transition. Côté joueurs et staff également, il est de plus en plus malvenu d’utiliser l’avion sur de courtes distances. Des discussions sont en cours avec la SNCF (le train est un transport peu carboné) pour gérer la privatisation des wagons pour les joueurs, le staff et leurs proches. 
  • Il est dans l’ADN des clubs et des joueurs de soutenir des fondations et donc d’agir sur le volet “social” de la RSE. La question climatique devra elle aussi prendre une part prépondérante de la vie et de la communication des clubs, on peut même aller plus loin en imaginant que la RSE pourrait devenir à terme un élément différenciant dans le recrutement des joueurs. 
  • Le sujet climatique reste encore nouveau pour les clubs. Ils ont besoin de se structurer sur le sujet (tout comme bon nombre d’organisations), mais la prise de conscience a eu lieu. Les clubs sont notamment accompagnés par la LFP et retenons que bien au-delà des rivalités sportives, les clubs s’entraident et s’inspirent les uns des autres pour traiter le problème du réchauffement climatique

Tous les clubs ont intérêt à être accompagnés dans le calcul de leurs émissions, dans la création de plans d’action leur permettant de réduire leur impact environnemental direct et indirect et dans la communication (parfois complexe) de leurs engagements. Chez Sami, on serait d'ailleurs ravi de leur donner un coup de main !


2. Les compétitions internationales

2.1 Exemples de bilans carbone de grandes compétitions internationales

Les compétitions internationales de football sont d’importants contributeurs au réchauffement climatique

La Coupe du Monde en Russie a par exemple engendré l’émission de 2,2 millions de tonnes de CO2 dont 73% étaient émises par les transports avec 1,6 million de tonnes de CO2, loin devant l’hébergement avec 253 000 tonnes de CO2.  À noter que, contrairement aux chiffres présentés pour l’Euro 2016 en France, le Bilan de la FIFA ne prend pas en compte la création ou la rénovation d’infrastructures dans le cadre de l’organisation de la compétition. Pourtant, de nombreux stades ont été rénovés ou même construits pour l’occasion.

2018 FIFA World Cup™ - Greenhouse gas accounting report

En prenant en compte les infrastructures, l’Euro 2016 en France, a de son côté engendré l’émission de 2,8 millions de tonnes de CO2e, avec 80% des émissions liées aux stades et un peu moins de 20% liées aux spectateurs. 

2.2 Les infrastructures

Comme évoqué juste avant, certains pays doivent construire des infrastructures pour accueillir des compétitions internationales. L’exemple de la Grèce pour les JO 2004 est resté gravé dans les mémoires, même si pas directement applicable au football : de nombreuses infrastructures ont été construites uniquement pour les JO et sont depuis à l’abandon, ce qu’on peut considérer comme un véritable gâchis écologique

Pour la prochaine Coupe du Monde, le Qatar a investi dans la construction ou la rénovation de 12 stades. Au-delà des graves accusations sur les conditions humaines de construction des stades, la question de leur impact carbone se pose également. 

Pour pallier les critiques liées à la construction des infrastructures, le Qatar a mis en avant la conception de “stades démontables”. Ce projet n’a toutefois été mené que sur un seul stade, le Ras Abu Aboud Stadium, construit avec des matériaux de récupération (dont des conteneurs maritimes), entièrement démontable, transportable et réutilisable en plusieurs arènes sportives et culturelles. 

Ras Abu Aboud Stadium Design

Reste que la plupart des stades sont construits neufs et ne seront probablement pas réutilisés ou démontés

Par ailleurs, les besoins en énergie seront également importants. Pour y pallier, le Qatar souhaite installer des panneaux solaires sur les stades. Cependant, en cas d’utilisation de la climatisation dans les stades, des chercheurs britanniques ont estimé qu’il faudrait environ "1 000 km2 de panneaux solaires, ce qui représente un dixième de la surface totale du Qatar... (11 437 km2)”.

2.3 Les déplacements des supporters

Le transport des supporters internationaux vers la Russie a constitué 57% des émissions de la Coupe du Monde de 2018. C’est le poste le plus important et aussi le plus difficile à réduire sauf en imaginant interdire la venue de supporters étrangers. 

Lors de l’Euro 2016 en France, la part des déplacements pesait aussi lourdement sur le Bilan Carbone de la compétition. En l’occurrence, ce sont les déplacements à destination ou au départ de la France qui ont représenté 96% de l’empreinte carbone des spectateurs (soit 517 000 tonnes de CO2e). Un chiffre assez logique puisque 36% des spectateurs sont venus en France en avion et 33% ont choisi la voiture. 

Sur place, les organisateurs de l’Euro 2016 ont toutefois tenté de promulguer des modes de transport décarbonés, on peut citer par exemple un partenariat avec la SNCF, permettant de développer l’offre de transport pendant la compétition et en fonction des rencontres. Les jours de match, 950 TGV et 200 TER supplémentaires permettaient aux spectateurs de se déplacer d’un lieu à l’autre pour suivre leur équipe. À noter également que le nombre de vols charters liés au tournoi (250) a été limité en comparaison avec d’autres événements. 

Les efforts sur le sujet ont porté leurs fruits, puisque 65% des spectateurs se rendaient au stade en transport public et 10% privilégiaient la marche ou le vélo. Le quart restant optait pour la voiture.

Dans tous les cas, il est important de souligner que les déplacements engendrent un impact environnemental immédiat. Entre une compétition aux quatre coins des États-Unis, nécessitant d’importants déplacements en avion et une compétition en Belgique, aux Pays-Bas et au Luxembourg, des zones reliées et desservies par un solide et décarboné réseau ferroviaire, le choix bas-carbone est évident.

2.4 Le rôle de la FIFA, de l’UEFA et des autres institutions du football 

La FIFA, l’UEFA (Union of European Football Associations) ou la FFF (Fédération Française de Football) sont encore peu présentes sur le terrain de l’engagement environnemental et climatique. 

La Fédération Internationale de Football (FIFA) adhère au « Climate Neutral Now », un programme de l’ONU visant à la “neutralité carbone” pour de tels événements. Les initiatives se contentent toutefois de “compenser les émissions de gaz à effet de serre liées à l’événement” privilégiant une neutralité carbone marketing à des actions de réduction concrètes de leurs émissions.

C’est à l’instance organisatrice de la compétition de s’assurer que l'impact carbone du pays hôte est réduit sur deux principaux sujets :

  • les infrastructures, en privilégiant des projets ne nécessitant pas ou peu de constructions, ou à tout le moins qui seront utilisés et amortis dans le temps, ce qui ne semble pas être le cas du Qatar
  • les déplacements, en privilégiant des projets qui permettent une mobilité décarbonée entre les stades

Récemment, Arsène Wenger, l’ancien entraîneur d’Arsenal et actuel chef du développement à la FIFA a annoncé vouloir proposer une Coupe du Monde tous les deux ans (elles ont actuellement lieu tous les quatre ans). Cette proposition vient à l’encontre d’une démarche plus raisonnée qui consiste à ne pas multiplier ce genre d’événement au poids carbone très important. Une Coupe du Monde plus locale, se fixant un plafond maximum d’émissions de CO2 devrait être l’objectif des instances internationales. 

Conclusion

Sans grande surprise, le football est un important émetteur de CO2 au travers notamment de ses infrastructures et des transports qu’il induit. Nous l’avons vu, des solutions existent pour réduire son poids carbone : éco-conception et meilleure utilisation des stades, réorganisation des déplacements des supporters, cahier des charges bas-carbone pour les grandes compétitions internationales, etc...

Les clubs et les institutions ont un rôle primordial à jouer dans la transition de leur sport vers un modèle durable. Ça tombe bien, chez Sami nous avons pour mission d’embarquer toutes les entreprises dans la transition bas-carbone, y compris les acteurs du football (et plus largement du sport).

Le football n’est pas un sport comme un autre, il est le sport du peuple et doit montrer la voie en se décarbonant. S’il s’engage avec ambition, son pouvoir fédérateur et sa notoriété permettront aux jeunes de demain de comprendre que la cause environnementale doit être mise au cœur des réflexions et que respecter nos engagements climatiques vaut peut-être plus qu’un but de Mbappé en finale de Coupe du Monde. 

“Les gens pensent que le football est une question de vie ou de mort. [...] Je peux leur assurer que c’est bien plus important que cela” (Bill Shankly (1913-1981), footballeur et entraîneur écossais).

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